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La dame à l'hermine

Marc Dekeister

On sait que Leonard de Vinci a produit très peu de tableaux, et que parmi ceux-ci, la Dame à l’hermine, qui date de 1488, est encore plus rare puisque c’est l’un des seuls quatre portraits féminins de l’artiste.

Ce portrait, mystérieux comme toutes les œuvres de Léonard, est celui de Cecilia Gallerani, célèbre maîtresse de Ludovico Sforza, duc de Milan, surnommé le Maure. La jeune femme tient une hermine dans les bras, une allusion au Duc Sforza, que l’on surnommait l’Hermine Blanche (Ermellino Bianco). Symbole de pureté, l’animal est d’ailleurs représenté dans les armes du duc.
Ce tableau est également célèbre car il est considéré par la critique comme le premier portrait moderne, en ce qu’il propose un visage pris au naturel et détournant son visage sur la gauche, et non pas comme cela se faisait jusqu’alors – avec un visage peint de profil ou de face. Représentant l’idéal de la Renaissance, il dépeint l’image comme une illusion de la vitalité naturelle et créée une représentation en trois dimensions sur une surface plane au moyen d’une utilisation très habile de la lumière. Cette œuvre révèle toute l’ambition et le talent du peintre, recherchant à révéler avec éclat une personnalité.

Le Polaroid rajoute une onde d’étrangeté bienvenue. La photographie, nimbée d’un voile noir et de fines rayures, amplifie l’originalité de cette œuvre iconique. Seul son regard, la délicate arrête de son nez et la bouche très fine de la belle Cecilia transparaissent dans cette adaptation contemporaine d’un chef-d’œuvre de la Renaissance. Cette transcription par un Polaroid retravaillé à l’acide la rend encore plus contemporaine. Vraiment, cette vénérable dame de plus de presque 600 ans est décidément bien moderne…