Padma Subramaniam, jeune danseuse de Bharatanatyam, Chennai, Tamil Nadu, Inde, février 1966
Roland & Sabrina Michaud
Padma Subramaniam est une célèbre danseuse de Bharatanatyam, une danse sacrée considérée comme la plus ancienne forme de danse classique indienne et enseignée depuis des millénaires dans le Sud de l’Inde (principalement dans l’Etat du Tamil Nadu). Pratiquée à l’origine dans les temples par les devadasi (littéralement les servantes de la divinité, des femmes consacrées aux temples dès leurs plus jeune âge),elle fut interdite sous la domination anglaise – à l’exception des comptoirs français de Pondichéry. Dévalorisée et découragée par les colonisateurs anglais au XIXe siècle, cette tradition a été sauvée au cours du XXe siècle, notamment après l’indépendance.
Le bharatanatyam est principalement une danse de soliste, dont l’apprentissage est extrêmement difficile et long. Il n’est pas rare, en effet, que les jeunes gens mettent au moins une dizaine d’années avant de pouvoir maîtriser cette technique. En Inde, elle est enseignée aux jeunes filles, et parfois aux jeunes garçons, par des gourous (les nattuvanars).
La légende veut que ce soient Shiva et Parvati qui l’aient transmise aux Apsaras, les danseuses célestes. Dans un style très élaboré, et au moyen d’une technique très précise dans ses gestes, la danseuse interprète symboliquement des histoires de la mythologie indienne. Ainsi, la précision des gestes de la main et des doigts vient compléter l’ensemble des mouvements du corps (position des jambes, du buste et éventuellement de l’enchaînement) qui constituent les adavus. Un peu à l’image des notes de musique, les adavus constituent les éléments de base qui permettent ensuite de combiner à l’infinie des compositions dansées. Car, le bharatanatyam n’est pas une simple forme dansée : c’est un art qui mêle constamment des mouvements techniques de danse (Nritta) à des démonstrations proches du mime (Nritya). Des sentiments qui sont exprimés grâce aux jeux de physionomie, aux mouvements des yeux mais aussi par les positions des mains et des doigts qui forment les 64 mudras que les jeunes danseuses répètent systématiquement à la fin de chaque cours.
Shiva accomplit la danse cosmique de la destruction et de la création de l’univers, qui symbolise le renouvellement périodique du monde en un rythme infini de dissolutions et de naissances. Pour les hindous, la danse est plus ancienne que le monde lui-même car c’est précisément en dansant que Shiva créa le cosmos et notre Âge, en prenant cette posture au moment de la création, posant le pied droit sur la tête du démon primordial, Apasmârapurusa, symbole d’ignorance et de cécité, et le tue. Cette sublime danse cosmique figure ainsi à la fois la création et la destruction des mondes, qui, selon le point de vue hindou, sont nécessairement liées et interdépendantes.